La petite histoire - Départ sur les routes

C’est l’histoire d’une fille, appelons la… Zazou, née dans le lointain Royaume de « Burdigala », d’un père artiste troubadour circassien et d’une mère comptable. Vous comprenez déjà que son éducation promettait une personnalité quelque peu… paradoxale. Zazou arrive dans une maison aimante avec un grand frère ingénieux, entourée de rires, et de gentils fous qui jouent de la musique, marchent sur les mains et voltigent dans les airs. Un vrai crique quoi.

Avec une telle famille, tout va si vite : elle su grimper aux échelles avant de savoir marcher, multiplier avant de lire, chanter avant de parler ! Mais … Il n’y a que dans les histoires que vitesse rime avec allégresse. Trop vite elle eut à connaitre la perte. Trop vite son père parti en voyage pour divertir quelques seigneurs. Trop vite un camion renversa la caravane du cirque. Trop vite. Beaucoup trop vite.

Dans la famille de Zzou tout va trop vite, on a pas e temps d’aller mal alors on a le sourire d’aller bien. On a la force d’avancer parce que la caravane doit continuer.

Le temps passe et Zazou va à l’école. Elle est bonne élève, parfois même la meilleure mais… elle est bavarde mais alors bavarde ! Tout va trop vite, elle bégaye car elle veut parler trop vite, oublie des mots car elle veut écrire trop vite et pose les questions qui ne sont pas de son âge. Quelle énergie !

Elle grandit et reste bien sage. Bon… elle embête un peu sa mère, quand même. Y a pas de raison, aussi réduite que soit la famille, la crise d’adolescence ça reste un droit. Elle continue à s’accrocher aux trapèzes, à monter sur des chevaux et à chanter la musique. Seulement, à l’école on le lui a dit « madame Zazou, il n’y a pas de bac pour ça ! Avec vos carnets de notes il faut aller à l’université pour trouver un vrai métier ». Bon d’accord, d’accord, aller à l’université. Faire un vrai métier. Mais quel métier ? Gardien de forêt ? Pompier ? Hôtesse de l’air ? Vétérinaire ? Certainement pas comptable comme sa mère !

6 ans d’études, 6 ans de petits métiers : serveuse, babysitteur, prof de trapèze, barmaid, agent d’entretien, plongiste, sondeuse, vendeuse de rêves et voyages… Peu importe, dans tous ces métiers vous savez ce qui est le mieux pour Zazou ? C’est d’avoir des collègues. Du reste, quand on est né dans un cirque on sait en faire un jeu. Elle voyage aussi, elle termine même dans une université à 145 lieues de Burdigala ! Au Royaume de Prouvenço

Un jour, ou plutôt plusieurs jours, parfois un peu au hasard, parfois après beaucoup de travail, mais toujours avec le sourire, Zazou réalise qu’elle fait un métier. Un vrai métier ! Comme ils le lui disaient à l’école. Oui. Elle travaille dans un endroit, un peu fou lui aussi, une espèce de grande ruche qui bourdonne toute la journée, remplie de petites abeilles qu’on appelle des "fonctionnaires". Et tous les jours les fonctionnaires tentent de transformer les rêves des habitants en réalités. Vaste programme !

26 ans (oui c’est précis) après le drame, dont nous ne reparlerons plus, la mère de Zazou vient à elle et lui dit quelque chose qui se rapproche de ceci « Ma Zazou, j’ai travaillé toute ma vie, toute ma vie j’ai compté l’argent des autres et gardé le mien. J’avais tellement peur de ne pouvoir vous nourrir que je n’ai rien dépensé. Mon projet c’était mon troubadour de mari et mes enfants. Aujourd’hui mes poches sont pleines mais mes enfants sont grands, ils se nourrissent tous seuls, ils ont des enfants à leur tour et pour finir le royaume me paie pour ne plus travailler. Quel est donc ce chemin qu’il me reste à parcourir ? » Zazou est bien ennuyée, elle ne sait que répondre. Alors elle réfléchi et un jour elle lui dit « Chère mère, je n’ai qu’une chose à te dire : voici venu le temps des cigales. Tu as été fourmi toute ta vie, petite fille fourmi dans ta famille nombreuse, puis fourmi de ta cigale de mari qui n’avait pas les pieds sur terre, ensuite fourmi construisant des galeries solides pour élever seule tes enfants. Tu as compté toute ta vie pour prendre soin des autres ? A ton tour ! Sois cigale et ne nous laisse rien d’autre que le souvenir de te voir suivre tes envies. » La mère de zazou réfléchie, négocie, mais fini par accepter. Soit ! Elle quitte sa peau de comptable pour devenir cigale.

Zazou a alors 30 ans et autour d’elle, dans le temps mais loin dans l’espace, elle a un frère-papa, une mère-cigale et un père bonne étoile. Zazou elle est quoi elle ? Zazou se perd. A 145 lieues de chez elle, Zazou commence à avoir le mal du pays. Dans quel royaume habiter ? A combien de jour de cheval est sa famille ? Un vrai métier c’est bien, mais ce n’est pas tout. Ils ne le disent pas ça à l’école. C’est pourtant une chance d’avoir un vrai métier et en plus un métier qui nous fait vivre, rire, et parfois même danser ! C’est une chance. Oui mais ce n’est pas tout.

Un jour la mère de Zazou reviens la voir « ma zazou je vie bien, je ne me prive de rien, je suis cigale et je chante. Il n’y aura jamais assez de livres, de théâtre et cinémas pour me rassasier. J’ai une maison que j’aime dans laquelle j’ai engagé quelques frais. Je n’ai que faire cet argent que j’ai passé ma vie à compter ! Tiens ! Voici une bourse, ton frère s’est acheté une demeure avec. Que feras tu de la tienne ? »

Zazou ne répond pas et rentre chez elle avec sa bourse. Mais zazou n'a pas besoin de demeure, Zazou ne veux pas de bijoux ou de tableaux. Zazou veut du soleil, des conversations sous les étoiles, des tournées générales, des lectures et… du temps. Oui du temps. Zazou elle veut acheter du temps. Mais le temps ça ne s’achète pas, le temps ça se vie. Sauf que Zazou elle a su trop vite, beaucoup trop vite, que le temps ça se perd aussi. Elle sait que parfois on part travailler et on ne revient jamais, même si on le souhaite vraiment.

Zazou regarde sa bourse et se demande : comment acheter du temps ? Elle se met alors à chercher conseil. Les économistes lui cirent « dépensez ! Consommez ! Empruntez ! » Les argentiers lui crient  « Empruntez ! Achetez ! Fructifiez ! » et quelque part dans sa tête son éducation de mère fourmi lui crie « garde ! épargne ! économise ! ». Il faut penser à plus tard, garder pour plus tard, construire pour plus tard. Et quoi ? Vivre plus tard ? Zazou n’est pas d’accord. Elle n’est plus d’accord. C’est vrai elle a tout bien fait l’école, les devoirs, l’université, les métiers… Mais la vie c’est maintenant, pas plus tard.

Alors Zazou dit non à toutes les voix qui lui disent « plus tard ». Elle prend la bourse que sa mère fourmi devenue cigale lui a donné et part avec une seule idée en tête : acheter la plus belle des caravanes qu’elle puisse trouver. C’est décidé, Zazou va prendre la route, pas de vrai métier, que du temps. Le temps c’est bien aussi. Ça non plus ils ne le disent pas à l’école. Mais elle le sait elle. Comment on dit déjà ? Ah oui, « les chiens aboient, la caravane passe ».

 


 

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